Bonjour à vous Je commencerais en vous remerciant pour votre travail, comme toujours de qualité, tant pour son sérieux que pour la pédagogie de l'exposé. Ce post risque d'être long, donc fragmenté, je rappellerais donc ces remerciements régulièrement pour ne pas induire le lectorat en erreur en lui laissant penser que j'instruis à charge. Il importera de savoir d'où je parle : je suis le fils de Françoise d'Eaubonne, ce qui ne me donne aucune autorité "naturelle" pour parler de son œuvre (ouf, un essentialisme de moins), et ne veux être jugé que sur mon travail. Par contre, j'ai une connaissance intime de la personne. Ce qui ne fait pas de moi non plus le détenteur d'une quelconque vérité ultime à son sujet, ma Françoise est aussi subjective qu'une autre, mais j'ai quelques faits et arguments à présenter qui peuvent enrichir débat et vision. Dans mon retour sur votre présentation, je suivrais le plan global de votre intervention, et je commencerais par une remarque générale qui sous-tend le reste : la culture universitaire tend à considérer que chaque livre est une unité autonome, propre à faire l'objet d'une critique pour ce qu'il est. Et ce qu'il est sera d'autant plus fort que l'autaire maîtrisera l'exercice. C'est pratique, rationnel, (je ne reviendrais pas sur la critique écoféministe du cartésianisme) cela offre de nombreux avantages, mais ça ne fonctionne pas systématiquement. Pas plus que moi, Françoise n'avait ces armes là (j'y reviendrais) et, comme vous l'avez dit, il est parfois bien difficile de s'y retrouver. A mon sens, cela ne peut se faire qu'avec une connaissance plus large de l'autrice, au risque sinon d'erreurs factuelles et de représentation biaisées, auxquelles vous n'échappez pas selon moi. Si elles ne sont pas fondamentales (votre travail reste très pertinent), elle donne un portrait de l'autrice et de son œuvre qu'il m'importe de compléter. "Une tendance récurrente à faire des analogies entre des formes d'oppression très diverses". C'est parfaitement exact. Je le vois pour ma part comme une prémisse à la réflexion sur l'intersectionnalité, un mot qui n'existait pas à l'époque et un débat inexistant dans le domaine public. En cela elle est novatrice au regard de l'ambiance intellectuelle de l'époque, préemptée par le marxisme et dans une moindre mesure l'humanisme, sachant que "nul ne peut rompre délibérément de l'atmosphère collective dans laquelle se déroule sa destinée singulière" (Françoise, le complexe de Diane, 1951). J'en profite pour donner une clef de compréhension de Françoise : elle a beaucoup réfléchis sur la théorisation de "l'expérience de la nécessité" selon la philosophe Simone Weil, résumé succinct : elle théorise que notre déni de la nécessité (comprise comme notre intangible obligation à s'inscrire dans la finitude du monde) est la source de notre illimitisme (matériel et psychique) qui engendre le déracinement des êtres. Vous ne serez donc pas étonné de l'emploi par Françoise, de ci de là, du terme "illimitisme". Militer et écrire Déjà, merci à vous d'éclairer les conditions de réalisation, chose qui est trop peu faite lorsqu'on présente des autaires, d'où les nombreux anachronisme induits. Pour connaître Françoise, il faut lire "l'Amazone Verte" d’Élise Thiébaud. Élise a fait un travail considérable tant de documentation que d'entretien, son roman de sa vie est fondamentalement juste de notre avis collectif, même si tout n'y est pas bien évidemment. "Rosita, une ardente féministe très politisé". Une femme puissante oui, qui a fait des études de mathématiques avec Marie Curie comme professeure, à une époque où elle a dû se battre physiquement pour accéder à l'amphi. Féministe non, elle n'a pas participé aux mouvements de l'époque et ne portait pas publiquement les valeurs des suffragettes, même si ces question n'était pas absente évidemment. Elle est aussi la fille d'un révolutionnaire Carliste (donc royaliste) réfugié en France et elle était imprégné par ses valeurs. Ce n'est pas pour rien qu'elle a marié Étienne, de culture non pas bourgeoise mais noble (le nom de famille est attesté depuis 1082) : égal mépris de la bourgeoisie et du prolétariat, sentiment "de race", etc...L'accueil des réfugiés de la guerre d'Espagne par la famille tient pour beaucoup au sentiment national de Rosita. Surtout n'en tirons pas de conclusions hâtives avec nos catégories mentales d'aujourd'hui, voici la suite : après avoir été tenté par un mouvement fasciste, ils militent au Sillon de Marc Sangnier (ancêtre de la JOC), ce qui ferait d'elleux en terme modernes des catholique progressistes. Et pour brouiller encore les pistes : la sœur aînée de Françoise, Frédérique, a été tout à la fois un des piliers après la guerre d'ACAT et pendant la guerre...la secrétaire particulière de Darlan. C'est à s'y perdre. Dans la particulier, excellente personne au demeurant, empathique, attentive et très révoltée contre les injustices tout en fréquentant des personnes...bref. "Anarchiste chrétien" me parait être un terme inapproprié pour qualifier Étienne. Il faut beaucoup de recul sur nos catégorisations contemporaines et un vrai travail d'historien pour situer l'ambiance qui a présidé à l'enfance de Françoise, dont la puissance indéniable aura été de faire autant de chemin vu d'où elle venait. Car en terme d'étude, ça a été pour Françoise la portion congrue au regard des standards d'aujourd'hui. Rappelons qu'elle a 4 ans (1924) lorsque l'éducation des filles est officialisée, et encore contient-elle des contenus obligatoires comme couture, etc...Certes, elle obtient un Bac (considérable à l'époque) et fait même quelques semaines en Faculté (Droit et Beaux-Arts) mais elle a passé l'essentiel de son temps dans un pensionnat catholique pour jeunes filles. On peut donc imaginer qu'il y a des trous dans la raquette de ses savoirs, tant en terme de contenus que de méthode. Ajoutez à cela un gêne matérielle constante (gazé en 1916 dans les tranchées, Étienne peine à nourrir sa famille) et la guerre de 39-45, vous voyez qu'on est loin d'un jeunesse et d'une formation facile. Et n'oublions pas non plus que Françoise n'a jamais vécu en couple ou si peu, qu'elle a toute sa vie dû subvenir à ses besoins sans être adossée socialement et économiquement à un homme. Difficile d’imaginer aujourd'hui ce que cela représente comme difficultés dans le monde de l'immédiat après-guerre... En 1945, Françoise est à l'arrivée des trains qui ramènent les déportés survivants des camps. Je vous laisse imaginer l'horreur. Hypothèse : les comparaisons qu'elle fera par la suite y trouvent leur source, dans un besoin d'exutoire, car ça fait parti des expérience que l'on porte pour le reste de sa vie. 1954 : Françoise est signataire du manifeste des 121 pour le droit à l'insoumission durant la guerre d'Algérie. C'est une cause qu'elle défendra jusqu'au bout. Elle quitte le PC en 56 pour cette raison principale et ira jusqu'à participer à des filières pour mettre à l'abri des déserteurs (action pas très réussie), ce qu'elle relate dans "Jusqu'à la gauche". C'est important à savoir pour évoquer ses engagements en dehors de l'hexagone. Rappelons que le FHAR était le Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire. "La lutte des homosexuels consiste non pas à intégrer la société, mais à la désintégrer" dixit Françoise, qui était par ailleurs hétérosexuelle depuis ses 20 ans. Quant à l'écoféminisme, Françoise prolonge sa pensée indirectement dans "Histoire de l'art et lutte des sexes" (1977), que je ne suis pas loin de considérer comme son meilleur essai. Passionnée de peinture et peintre elle-même (son jardin secret), elle y fait aussi une analyse fulgurante de la place historique des femmes dans l'art. Voilà pour le moment, merci encore pour votre travail. pas de remarques particulières sur la partie "être une femme", et comme il est 3 heures du mat' je verrais plus tard pour le suite, Septembre 21 : Sortie aux PUF de "Naissance de l'écoféminisme", 32 000 signes de Le féminisme ou la mort" avec un commentaire de Caroline Lejeune. Octobre 21 : réédition chez Julliard de "Le complexe de Diane", en défense du 2eme sexe, avec une (excellente) préface d’Élise Thiébaud. Et pleins d'autres projets en cours, dont des rencontres mensuelles à l'IMEC sur son œuvre à partir de septembre avant une rencontre internationale fin 22.
Bonjour, merci pour toutes ces précisions ! Souhaiteriez-vous voir amender la vidéo pour y inclure les précisions qui vous semblent importantes pour la compréhension ? Il y a bien sûr beaucoup de détails que vous notez ici qui m'ont échappés, j'ai travaillé avec quelques ouvrages et articles, en essayant de ne pas tirer mes propres analyses trop loin du texte - et par ailleurs, j'ai aussi évité de trop m'appuyer sur ses biographies pour pousser l'analyse, de peur de tomber dans d'autres écueils interprétatifs. Ce que vous dites sur son expérience du nazisme, par exemple, j'ai préféré ne pas trop en tirer de conclusions, il y a beaucoup de facteurs qui peuvent amener, des décennies plus tard, à écrire ce que l'on écrit, et je préférais ne pas spéculer outre mesure. Néanmoins si vous souhaitez que je reprenne certains points, vous pouvons en parler. N'hésitez pas à m'écrire à cette adresse : gameofhearth.ph@gmail.com.
@@GameOfHearth Merci pour votre réponse, et pour votre proposition. Ceci étant, nulle demande spécifique à revenir sur votre contenu, qui est très bien, je vous laisse juge. Mon objectif était surtout d'enrichir le propos pour les personnes qui suivent votre chaîne. Je ne prétend nullement détenir une "vérité historique", concept suspect s'il en est, tout comme la position de "fils de" qui me donnerait par nature une autorité morale ou intellectuelle. Ce serait d'ailleurs une trahison de ce qu'elle était et défendait. Je me vois plutôt comme un personne ressource, qui produit par ailleurs ces propres analyses dans la prolongation de son travail, devant être commentées au même titre que n'importe quelle autre. C'est pourquoi, si vous souhaitez approfondir quelque point la concernant je suis à votre disposition pour vous fournir des infos / sources dont vous ferez ce que vous avez à faire, et je ne doute pas que ce soit intéressant au vu de la qualité de votre travail. Quant à votre retour spécifique je souscris. Que vous n'ayez pas eu accès à autant de détails est parfaitement compréhensible, on pourrait difficilement vous reprocher d'accumuler autant de documentation pour chaque vidéo que vous faites.. Je vous envoie un mail, vous aurez le contact si besoin. Bonne route à vous !
Françoise d’Eaubonne a été à l'origine de mon éducation feministe et bien sûr, j'ai reçu de ses mains ce livre : l’écoféminisme et d'autres avec sa dédicace. Grâce à elle, j'ai lu et changé ma vie. Je vais lire L’Amazone verte d’Élise Thiébaut. En sa mémoire.
Je partage pratiquement toutes les positions de Françoise d' Eaubonne que vous exposez si clairement .Un grand merci pour votre travail qui permet de se dispenser pour un temps de longues et difficiles lectures, car vous en dégagez tellement les points essentiels qu'on ne se sent pas frustré.💚💐🗽
Ca ne change pas complètement le propos par ailleurs très intéressant, mais tout de même elle y va fort sur les luttes féministes du sud et des pays socialistes, du moins si on en croit cet article du monde diplomatique : "Les « grands-mères rouges » du mouvement international des femmes", (www.monde-diplomatique.fr/2021/07/GHODSEE/63271 ), ou celui ci de leur mensuel "manière de voir" : "Les oubliées de San Francisco" (www.monde-diplomatique.fr/mav/150/LUHR_DIETRICHSON/56861 ).
Merci encore pour le boulot! C'est intéressant qu'Eaubonne, connue comme fondatrice du FHAR, ne mette pas en avant la position des lesbiennes (et des homosexuel.le.s en général d'ailleurs). Les traductrices du livre en anglais (il a été publie en même temps chez Verso) faisaient justement la remarque dans la conférence d'inauguration de la publication (a retrouver ici ruclips.net/video/It4vhHFQxIM/видео.html). En point mort pas anodin dans un livre qu'a l'air tout de même bien fourre-tout :D
Tu reviendrais pas sur Le Féminisme décolonial, notamment à travers le petit manifeste de Vergès paru en 2018 et le fémonationalisme, théorisé par Sara Farris stp ? Ce serait intéressant d'intégrer de l'anti-racisme dans tout ça. Des bisous !
Ya des livres et articles de Djamilla Ribeiro qui sont en train d'être traduits. Et un passage par l'Afro-féminisme serait vachement bien aussi ! Stp ! Stp ! Stp !!!!
Oui il faut ! Cette année ça va être chaud, j'aurais dû le faire avant de me trouver débordée de travail... Mais je me le renote et je verrais si c'est possible de l'envisager (tu verras dans la prochaine vidéo le pourquoi du comment c'est rude niveau temps dispo)
Bonjour à vous
Je commencerais en vous remerciant pour votre travail, comme toujours de qualité, tant pour son sérieux que pour la pédagogie de l'exposé. Ce post risque d'être long, donc fragmenté, je rappellerais donc ces remerciements régulièrement pour ne pas induire le lectorat en erreur en lui laissant penser que j'instruis à charge.
Il importera de savoir d'où je parle : je suis le fils de Françoise d'Eaubonne, ce qui ne me donne aucune autorité "naturelle" pour parler de son œuvre (ouf, un essentialisme de moins), et ne veux être jugé que sur mon travail. Par contre, j'ai une connaissance intime de la personne. Ce qui ne fait pas de moi non plus le détenteur d'une quelconque vérité ultime à son sujet, ma Françoise est aussi subjective qu'une autre, mais j'ai quelques faits et arguments à présenter qui peuvent enrichir débat et vision.
Dans mon retour sur votre présentation, je suivrais le plan global de votre intervention, et je commencerais par une remarque générale qui sous-tend le reste : la culture universitaire tend à considérer que chaque livre est une unité autonome, propre à faire l'objet d'une critique pour ce qu'il est. Et ce qu'il est sera d'autant plus fort que l'autaire maîtrisera l'exercice. C'est pratique, rationnel, (je ne reviendrais pas sur la critique écoféministe du cartésianisme) cela offre de nombreux avantages, mais ça ne fonctionne pas systématiquement. Pas plus que moi, Françoise n'avait ces armes là (j'y reviendrais) et, comme vous l'avez dit, il est parfois bien difficile de s'y retrouver. A mon sens, cela ne peut se faire qu'avec une connaissance plus large de l'autrice, au risque sinon d'erreurs factuelles et de représentation biaisées, auxquelles vous n'échappez pas selon moi. Si elles ne sont pas fondamentales (votre travail reste très pertinent), elle donne un portrait de l'autrice et de son œuvre qu'il m'importe de compléter.
"Une tendance récurrente à faire des analogies entre des formes d'oppression très diverses". C'est parfaitement exact. Je le vois pour ma part comme une prémisse à la réflexion sur l'intersectionnalité, un mot qui n'existait pas à l'époque et un débat inexistant dans le domaine public. En cela elle est novatrice au regard de l'ambiance intellectuelle de l'époque, préemptée par le marxisme et dans une moindre mesure l'humanisme, sachant que "nul ne peut rompre délibérément de l'atmosphère collective dans laquelle se déroule sa destinée singulière" (Françoise, le complexe de Diane, 1951).
J'en profite pour donner une clef de compréhension de Françoise : elle a beaucoup réfléchis sur la théorisation de "l'expérience de la nécessité" selon la philosophe Simone Weil, résumé succinct : elle théorise que notre déni de la nécessité (comprise comme notre intangible obligation à s'inscrire dans la finitude du monde) est la source de notre illimitisme (matériel et psychique) qui engendre le déracinement des êtres. Vous ne serez donc pas étonné de l'emploi par Françoise, de ci de là, du terme "illimitisme".
Militer et écrire
Déjà, merci à vous d'éclairer les conditions de réalisation, chose qui est trop peu faite lorsqu'on présente des autaires, d'où les nombreux anachronisme induits. Pour connaître Françoise, il faut lire "l'Amazone Verte" d’Élise Thiébaud. Élise a fait un travail considérable tant de documentation que d'entretien, son roman de sa vie est fondamentalement juste de notre avis collectif, même si tout n'y est pas bien évidemment.
"Rosita, une ardente féministe très politisé". Une femme puissante oui, qui a fait des études de mathématiques avec Marie Curie comme professeure, à une époque où elle a dû se battre physiquement pour accéder à l'amphi. Féministe non, elle n'a pas participé aux mouvements de l'époque et ne portait pas publiquement les valeurs des suffragettes, même si ces question n'était pas absente évidemment. Elle est aussi la fille d'un révolutionnaire Carliste (donc royaliste) réfugié en France et elle était imprégné par ses valeurs. Ce n'est pas pour rien qu'elle a marié Étienne, de culture non pas bourgeoise mais noble (le nom de famille est attesté depuis 1082) : égal mépris de la bourgeoisie et du prolétariat, sentiment "de race", etc...L'accueil des réfugiés de la guerre d'Espagne par la famille tient pour beaucoup au sentiment national de Rosita.
Surtout n'en tirons pas de conclusions hâtives avec nos catégories mentales d'aujourd'hui, voici la suite : après avoir été tenté par un mouvement fasciste, ils militent au Sillon de Marc Sangnier (ancêtre de la JOC), ce qui ferait d'elleux en terme modernes des catholique progressistes. Et pour brouiller encore les pistes : la sœur aînée de Françoise, Frédérique, a été tout à la fois un des piliers après la guerre d'ACAT et pendant la guerre...la secrétaire particulière de Darlan. C'est à s'y perdre. Dans la particulier, excellente personne au demeurant, empathique, attentive et très révoltée contre les injustices tout en fréquentant des personnes...bref. "Anarchiste chrétien" me parait être un terme inapproprié pour qualifier Étienne. Il faut beaucoup de recul sur nos catégorisations contemporaines et un vrai travail d'historien pour situer l'ambiance qui a présidé à l'enfance de Françoise, dont la puissance indéniable aura été de faire autant de chemin vu d'où elle venait.
Car en terme d'étude, ça a été pour Françoise la portion congrue au regard des standards d'aujourd'hui. Rappelons qu'elle a 4 ans (1924) lorsque l'éducation des filles est officialisée, et encore contient-elle des contenus obligatoires comme couture, etc...Certes, elle obtient un Bac (considérable à l'époque) et fait même quelques semaines en Faculté (Droit et Beaux-Arts) mais elle a passé l'essentiel de son temps dans un pensionnat catholique pour jeunes filles. On peut donc imaginer qu'il y a des trous dans la raquette de ses savoirs, tant en terme de contenus que de méthode. Ajoutez à cela un gêne matérielle constante (gazé en 1916 dans les tranchées, Étienne peine à nourrir sa famille) et la guerre de 39-45, vous voyez qu'on est loin d'un jeunesse et d'une formation facile. Et n'oublions pas non plus que Françoise n'a jamais vécu en couple ou si peu, qu'elle a toute sa vie dû subvenir à ses besoins sans être adossée socialement et économiquement à un homme. Difficile d’imaginer aujourd'hui ce que cela représente comme difficultés dans le monde de l'immédiat après-guerre...
En 1945, Françoise est à l'arrivée des trains qui ramènent les déportés survivants des camps. Je vous laisse imaginer l'horreur. Hypothèse : les comparaisons qu'elle fera par la suite y trouvent leur source, dans un besoin d'exutoire, car ça fait parti des expérience que l'on porte pour le reste de sa vie.
1954 : Françoise est signataire du manifeste des 121 pour le droit à l'insoumission durant la guerre d'Algérie. C'est une cause qu'elle défendra jusqu'au bout. Elle quitte le PC en 56 pour cette raison principale et ira jusqu'à participer à des filières pour mettre à l'abri des déserteurs (action pas très réussie), ce qu'elle relate dans "Jusqu'à la gauche". C'est important à savoir pour évoquer ses engagements en dehors de l'hexagone.
Rappelons que le FHAR était le Front Homosexuel d'Action Révolutionnaire. "La lutte des homosexuels consiste non pas à intégrer la société, mais à la désintégrer" dixit Françoise, qui était par ailleurs hétérosexuelle depuis ses 20 ans.
Quant à l'écoféminisme, Françoise prolonge sa pensée indirectement dans "Histoire de l'art et lutte des sexes" (1977), que je ne suis pas loin de considérer comme son meilleur essai. Passionnée de peinture et peintre elle-même (son jardin secret), elle y fait aussi une analyse fulgurante de la place historique des femmes dans l'art.
Voilà pour le moment, merci encore pour votre travail. pas de remarques particulières sur la partie "être une femme", et comme il est 3 heures du mat' je verrais plus tard pour le suite,
Septembre 21 : Sortie aux PUF de "Naissance de l'écoféminisme", 32 000 signes de Le féminisme ou la mort" avec un commentaire de Caroline Lejeune.
Octobre 21 : réédition chez Julliard de "Le complexe de Diane", en défense du 2eme sexe, avec une (excellente) préface d’Élise Thiébaud.
Et pleins d'autres projets en cours, dont des rencontres mensuelles à l'IMEC sur son œuvre à partir de septembre avant une rencontre internationale fin 22.
Bonjour, merci pour toutes ces précisions ! Souhaiteriez-vous voir amender la vidéo pour y inclure les précisions qui vous semblent importantes pour la compréhension ?
Il y a bien sûr beaucoup de détails que vous notez ici qui m'ont échappés, j'ai travaillé avec quelques ouvrages et articles, en essayant de ne pas tirer mes propres analyses trop loin du texte - et par ailleurs, j'ai aussi évité de trop m'appuyer sur ses biographies pour pousser l'analyse, de peur de tomber dans d'autres écueils interprétatifs. Ce que vous dites sur son expérience du nazisme, par exemple, j'ai préféré ne pas trop en tirer de conclusions, il y a beaucoup de facteurs qui peuvent amener, des décennies plus tard, à écrire ce que l'on écrit, et je préférais ne pas spéculer outre mesure.
Néanmoins si vous souhaitez que je reprenne certains points, vous pouvons en parler. N'hésitez pas à m'écrire à cette adresse : gameofhearth.ph@gmail.com.
@@GameOfHearth Merci pour votre réponse, et pour votre proposition. Ceci étant, nulle demande spécifique à revenir sur votre contenu, qui est très bien, je vous laisse juge. Mon objectif était surtout d'enrichir le propos pour les personnes qui suivent votre chaîne. Je ne prétend nullement détenir une "vérité historique", concept suspect s'il en est, tout comme la position de "fils de" qui me donnerait par nature une autorité morale ou intellectuelle. Ce serait d'ailleurs une trahison de ce qu'elle était et défendait. Je me vois plutôt comme un personne ressource, qui produit par ailleurs ces propres analyses dans la prolongation de son travail, devant être commentées au même titre que n'importe quelle autre. C'est pourquoi, si vous souhaitez approfondir quelque point la concernant je suis à votre disposition pour vous fournir des infos / sources dont vous ferez ce que vous avez à faire, et je ne doute pas que ce soit intéressant au vu de la qualité de votre travail.
Quant à votre retour spécifique je souscris. Que vous n'ayez pas eu accès à autant de détails est parfaitement compréhensible, on pourrait difficilement vous reprocher d'accumuler autant de documentation pour chaque vidéo que vous faites..
Je vous envoie un mail, vous aurez le contact si besoin. Bonne route à vous !
@@Vincent-ve5qx )
Françoise d’Eaubonne a été à l'origine de mon éducation feministe et bien sûr, j'ai reçu de ses mains ce livre : l’écoféminisme et d'autres avec sa dédicace. Grâce à elle, j'ai lu et changé ma vie.
Je vais lire L’Amazone verte d’Élise Thiébaut. En sa mémoire.
A @Vincent d’Eaubonne
Je partage pratiquement toutes les positions de Françoise d' Eaubonne que vous exposez si clairement .Un grand merci pour votre travail qui permet de se dispenser pour un temps de longues et difficiles lectures, car vous en dégagez tellement les points essentiels qu'on ne se sent pas frustré.💚💐🗽
Brave femme.Merci pour ton travail.
Vidéo très bien construite et claire comme d'habitude, merci pour ce travail !
Super vidéo, très intéressante merci !
Vidéo de qualité, merci, pouce bleu
merci pour ton travail
Merci!!!
Bonjour
Je suis votre chaine avec intérêt depuis un moment.... Auriez vous des liens qui explicitent l'influence d'Erlich sur Fd'E ?
Bien à vous
Merci pour cette présentation
encore une super vidéo! je lirais peut-être le livre par curiosité
Ca ne change pas complètement le propos par ailleurs très intéressant, mais tout de même elle y va fort sur les luttes féministes du sud et des pays socialistes, du moins si on en croit cet article du monde diplomatique : "Les « grands-mères rouges » du mouvement international des femmes", (www.monde-diplomatique.fr/2021/07/GHODSEE/63271 ), ou celui ci de leur mensuel "manière de voir" : "Les oubliées de San Francisco" (www.monde-diplomatique.fr/mav/150/LUHR_DIETRICHSON/56861 ).
Merci encore pour le boulot! C'est intéressant qu'Eaubonne, connue comme fondatrice du FHAR, ne mette pas en avant la position des lesbiennes (et des homosexuel.le.s en général d'ailleurs). Les traductrices du livre en anglais (il a été publie en même temps chez Verso) faisaient justement la remarque dans la conférence d'inauguration de la publication (a retrouver ici ruclips.net/video/It4vhHFQxIM/видео.html). En point mort pas anodin dans un livre qu'a l'air tout de même bien fourre-tout :D
Elle a parlé de tellement de choses :D Je pense que ça mériterait beaucoup plus d'analyses que le peu qu'on a pour le moment !
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Tu reviendrais pas sur Le Féminisme décolonial, notamment à travers le petit manifeste de Vergès paru en 2018 et le fémonationalisme, théorisé par Sara Farris stp ? Ce serait intéressant d'intégrer de l'anti-racisme dans tout ça.
Des bisous !
Ya des livres et articles de Djamilla Ribeiro qui sont en train d'être traduits. Et un passage par l'Afro-féminisme serait vachement bien aussi ! Stp ! Stp ! Stp !!!!
Oui il faut ! Cette année ça va être chaud, j'aurais dû le faire avant de me trouver débordée de travail... Mais je me le renote et je verrais si c'est possible de l'envisager (tu verras dans la prochaine vidéo le pourquoi du comment c'est rude niveau temps dispo)
@@GameOfHearth 😉👍❤