LOCKE, HOBBES, ARISTOTE : comment répartir le pouvoir politique? (Traité du gouvernement civil, 6/7)

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  • Опубликовано: 16 окт 2024
  • On dit généralement qu'il faut séparer les pouvoirs pour éviter la tyrannie. Cette idée se trouve déjà dans Les Politiques d'Aristote, et plus tard elle sera reprise par exemple par Montesquieu. Mais la séparation des pouvoirs peut aussi impliquer des conflits irrémédiables entre ces différents pouvoirs, c'est pourquoi Hobbes a défendu une théorie de la souveraineté dans son ouvrage Le Léviathan, qui s'oppose à l'idée d'une stricte séparation des pouvoirs. La question est alors la suivante : peut-on construire une théorie de la souveraineté ne courant pas le risque de la tyrannie ?
    Rousseau, dans Du contrat social, a proposé une conception de la souveraineté populaire qui poursuit cet objectif. Mais il tombe peut-être sous le coup de l'objection dite de la "tyrannie de la majorité". C'est pourquoi nous nous tournons ici vers John Locke, qui a construit une solution différente dans son Traité du gouvernement civil, qu'on appelle parfois le "constitutionalisme".
    § 149 : "149. Dans un État formé, qui subsiste, et se soutient, en demeurant appuyé sur les fondements, et qui agit conformément à sa nature, c'est-à-dire, par rapport à la conservation de la société, il n'y a qu'un pouvoir suprême, qui est le pouvoir législatif, auquel tous les autres doivent être subordonnés; mais cela n'empêche pas que le pouvoir législatif ayant été confié, afin que ceux qui l'administreraient agissent pour certaines fins, le peuple ne se réserve toujours le pouvoir souverain d'abolir le gouvernement ou de le changer, lorsqu'il voit que les conducteurs, en qui il avait mis tant de confiance, agissent d'une manière contraire à ]afin pour laquelle ils avaient été revêtus d'autorité. Car tout le pouvoir qui est donné et confié en vue d'une fin, étant limité par cette fin-là, dès que cette fin vient à être négligée par les personnes qui ont reçu le pouvoir dont nous parlons, et qu'ils font des choses qui y sont directement opposées; la confiance qu'on avait mise en eux doit nécessairement cesser et l'autorité qui leur avait été remise est dévolue au peuple, qui peut la placer de nouveau où il jugera à propos, pour sa sûreté et pour son avantage. Ainsi, le peuple garde toujours le pouvoir souverain de se délivrer des entreprises de toutes sortes de personnes, même de ses législateurs, s'ils venaient à être assez fous ou assez méchants, pour former des desseins contre les libertés et les propriété des sujets. En effet, personne, ni aucune société d'hommes, ne pouvant remettre sa conservation, et conséquemment tous les moyens qui la procurent, à la volonté absolue et à la domination arbitraire de quelqu'un, quand même quelqu'un en aurait réduit d'autres à la triste condition de l'esclavage, ils seraient toujours en droit de maintenir et conserver ce dont ils n'auraient point droit de se départir; et étant entrés en société dans la vue de pouvoir mieux conserver leurs personnes, et tout ce qui leur appartient en propre, ils auraient bien raison de se délivrer de ceux qui violeraient, qui renverseraient la loi fondamentale, sacrée et inviolable, sur laquelle serait appuyée la conservation de leur vie et de leurs biens. De sorte que le peuple doit être considéré, à cet égard, comme ayant toujours le pouvoir souverain, mais non toutefois comme exerçant toujours ce pouvoir; car, il ne l'exerce pas, tandis que la forme de gouvernement qu'il a établie subsiste; c'est seulement lorsqu'elle est renversée par l'infraction des lois fondamentales sur lesquelles elle était appuyée."
    § 243. 243. Donc, pour conclure, le pouvoir que chaque particulier remet à la société dans laquelle il entre, ne peut jamais retourner aux particuliers pendant que la société subsiste, mais réside toujours dans la communauté; parce que, sans cela, il ne saurait y avoir de communauté ni d'État, ce qui pourtant serait tout à fait contraire à la convention originaire. C'est pourquoi, quand le peuple a placé le pouvoir législatif dans une assemblée, et arrêté que ce pouvoir continuerait à être exercé par l'assemblée et par ses successeurs, auxquels elle aurait elle-même soin de pourvoir, le pouvoir législatif ne peut jamais retourner au peuple, pendant que le gouvernement subsiste; parce qu'ayant établi une puissance législative pour toujours, il lui a remis tout le pouvoir politique; et ainsi, il ne peut point le reprendre. Mais [...] si ceux qui sont constitués en autorité ont, par leur mauvaise conduite, perdu leur droit et leur pouvoir; quand les conducteurs ont perdu ainsi leur pouvoir et leur droit, ou que le temps déterminé est fini, le pouvoir suprême retourne à la société, et le peuple a droit d'agir en qualité de souverain, et d'exercer l'autorité législative, ou bien d'ériger une nouvelle forme de gouvernement, et de remettre la suprême puissance, dont il se trouve alors entièrement et pleinement revêtu, entre de nouvelles mains, comme il juge à propos."

Комментарии • 7

  • @kanyamagaraabdallah8300
    @kanyamagaraabdallah8300 11 месяцев назад

    merci frere , je sure que je allait regarde plusieurs fois cette video! en ordre j´ai mettre mon rever de pouvoir de demains

  • @ibrahimsow8803
    @ibrahimsow8803 Год назад +1

    Merci pour ce podcast.fait nous en un sur J J ROUSEAU slp

  • @abdelb.7551
    @abdelb.7551 Месяц назад

    Le pouvoir est il vraiment séparé en Occidanie ?!

  • @emmanuela4606
    @emmanuela4606 2 года назад +1

    Merci beaucoup pour votre travail, j'ai écouté les vidéos de votre chaîne avec attention.
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    Il y a peu de chances que ce message (très candide) vous intéresse, mais j'avais envie de partager ici une réflexion personnelle qui pourrait peut-être correspondre à la proposition d'Aristote que vous citez de « mélanger les éléments démocratiques et aristocratiques » (et au pire cela vous fera un commentaire pour l'algo ^^) ...
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    Je m'étais amusé, dans le cadre d'un roman de science-fiction (abandonné) à imaginer ce que serait pour moi une société idéale. Pour cela, je me suis librement inspiré de ce que semble avoir été la gestion des communs dans les sociétés traditionnelles (ou plutôt de ce que j'ai cru en comprendre).
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    Pour résumer, le pouvoir serait confié (en partie) à un « ordre laïc » (sans aucune hiérarchie). Il y aurait dans la population 0,5 % de personnes élevées au rang de « sages » et lorsqu'un besoin décisionnel se ferait sentir, on convoquerait un conseil des sages. Pour cela, on tirerait au sort un certains nombre de sages qui auraient toute latitude pour convoquer des personnes, commander des expertises... afin de prendre les meilleures décisions possibles pour la communauté.
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    Si cela intéresse quelqu'un (de courageux ^^) je détaille le fonctionnement politique de ce monde dans la (très longue ^^) réponse ci-dessous (rédigé juste pour vous):
    Par ailleurs, si vous avez des conseils de lecture à me proposer (style cité utopique) je suis preneur !

    • @emmanuela4606
      @emmanuela4606 2 года назад

      Un monde idéal serait, dans mon idée, d'abord pérenne (sans doute en réaction à notre monde actuel), inscrit sur le temps long, il pourrait faire évoluer ses fondamentaux, mais à son rythme... Il aurait comme caractéristiques de se soucier du bien-être de tous sans chercher à plier les individus, mais plutôt en leur offrant la possibilité de s'épanouir et de trouver leur place.
      Il serait la résultante de deux forces contraires, l'une cherchant à stabiliser le monde, l'autre à le dynamiser, à promouvoir la diversité.
      Ces deux forces seraient les sages et les cités.
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      Les sages (que j'appelle des « désintéressés » en hommage à Ursula K Le Guin et à Platon) n'ont pas de propriété privée ni de famille, la communauté subvient à tous leurs besoins.
      Ils ne sont pas sélectionnés pour leurs sagesses, mais seulement par leurs compétences : chacun peut postuler et être choisi en faisant preuve de qualifications dans les domaines les plus variés (autant manuels qu'intellectuels) en fonction des besoins du moment de la communauté (jusqu'à satisfaire le seuil des 0,5 % de la population).
      Afin de connaître intimement la population, un désintéressé a l'obligation de participer aux travaux de la communauté, de se former et de voyager régulièrement de cité en cité. Il note ses activités dans un carnet et porte un petit bracelet en signe de distinction. Il peut mettre son nez où bon lui semble (sous réserve de ne rien dévoiler de ce qu'il découvre hors des conseils de sages). Il peut servir de médiateur en cas de petits conflits.
      Il n'y a aucune hiérarchie parmi les sages, outre le fait que, lors d'un conseil, chaque vote a un poids proportionnel au temps passé à « porter le bracelet ».
      On peut devenir désintéressé à n'importe quel âge et choisir à n'importe quel moment de quitter l'ordre (définitivement) afin de rejoindre la vie civile, se fixer quelque part, fonder ou retrouver sa famille...
      Pour écarter un désintéressé qui semble ne pas remplir correctement sa mission on convoque un conseil des pairs.
      Les désintéressés ont deux fonctions spécifiques : gérer les ressources communes (eau, minéraux, énergies, pisciculture...) et amender la constitution.
      Ce sont les travailleurs d'une ressource qui, lorsqu'il y a nécessité de prendre des décisions autres que celles nécessaires à la gestion "quotidienne", font appel à un conseil des communs. Ils évaluent le nombre de désintéressés nécessaires et organisent un tirage au sort parmi les sages présents dans la région concernée.
      Les décisions du conseil se prennent en votant, chaque trimestre à « porter le bracelet » donne un vote supplémentaire au désintéressé. Par contre, pour être validées les décisions du conseil nécessitent un vote à la majorité nominale (1 voix par personne), sinon un autre conseil est convoqué.
      Ce sont les représentants des cités qui jugent si la constitution doit être amendée et qui convoquent un conseil. La constitution fixe le cadre général dans lequel doivent s'inscrire les lois des cités. Ce sont les cités qui valident les décisions du conseil constitutionnel.
      Pour autant qu'elles respectent la constitution, chaque cité peut être gérée comme bon lui semble (j'ai supposé que l'essentiel des cités seraient démocratiques). Rien n'entravant la circulation des personnes (hors Covid exceptionnel ^^) les cités sont en concurrences les unes avec les autres et c'est le flux des personnes qui servirait de verdict sur ce qui fonctionne ou pas...
      J'ai un peu de mal à proposer un exécutif convenable. Qui donc serait en charge de recadrer une cité qui se refuse à respecter la constitution ? On pourrait peut-être imaginer un système de « réservistes », de simples citoyens pouvant être convoqué et dirigé par les désintéressés en cas de crises...
      L'ordre des sages domine... Pour autant, je pense qu'il serait difficile de corrompre ce système. Une dictature semble improbable dans un système où les décideurs sont tirés au sort... L'absence de hiérarchie et de lignage possible sont deux gages supplémentaires. Aussi les désintéressés vivent parmi la population « ordinaire », ils en sont issus, ils ont parmi elle leurs familles, leurs amis proches...
      A mon avis, le principal problème de ce monde serait plutôt qu'il s'endorme, qu'il se fige en une « fin de l'histoire » désespérante...
      Pour cela, j'ai imaginé les artistes, les poils à gratter du système. ^^
      J'ai posé que les cités, en plus de devoir « entretenir » les désintéressés, ont aussi un devoir d'hospitalité envers tout visiteur. Ceux-ci étant logés et nourris gratuitement (et chichement) avec comme seul réciprocité de respecter les lois et de ne séjourner que pour un nombre de jours limité.
      Cette obligation a de très nombreux avantages : déjà, elle casse tout lien de subordination, si une situation (professionnelle ou familiale) ne convient pas, il est très facile d'aller voir ailleurs. Les rapports humains se doivent d'être cordiaux où ils ne durent pas... De plus, elle permet à chacun de chercher sa juste place le temps qu'il faut, principalement du temps de la fin de l'adolescence.
      Ce mode de vie nomade peut aussi convenir à des personnes pour leur vie entière. Certains étants solitaires, mais la plupart se déplaçant en troupes : les artistes.
      La plupart des artistes proposent des spectacles ou diverses activités. Ils amènent surtout avec eux de nouvelles façons de penser, de voir le monde, du « sang frais »...
      L'un des problème auquel je n'ai pas trouvé de « bonnes » solutions et l'éventualité d'une sur-population, car il faudrait sans doute trouver un moyen « acceptable » d'inciter, voir de contraindre la population à se limiter si elle ne le fait pas d'elle-même...
      Je vous fais grâce des questions économiques...
      P.S. L'action du roman se déroulait sur Terre en 2500. Les seules zones habitables aux humains se situaient autour de l'Arctique (entièrement fondu) et dans quelques rares régions de l'hémisphère sud (Nouvelle Zélande...). On s'y déplaçait principalement à pied, en vélo ou en bateau à voile et il n'y avait plus aucun animal terrestre plus gros qu'un chat.

    • @Lespodcastsphilosophiques
      @Lespodcastsphilosophiques  2 года назад

      Bonjour, merci pour vos messages !
      Je ne vais pas m'exprimer sur ce que vous proposez, mais c'était en tout cas effectivement un commentaire bien lié au sujet de la vidéo ! Pour ce qui est des réflexions utopistes sur l'organisation politique, il y a L'Utopie de Thomas More qui peut être intéressante, ou encore, un peu plus près de nous, les réflexions de Saint-Simon ou de Fourrier au XIXème siècle.

    • @emmanuela4606
      @emmanuela4606 2 года назад

      @@Lespodcastsphilosophiques Merci beaucoup pour votre message, je connaissais Fourrier mais moins les deux autres, je vais regarder ça.