Moulin du Pontrancart : restaurer la continuité écologique en préservant le patrimoine (reportage)

Chantier de restauration de la continuité écologique du Pontrancart, Ancourt, Seine-Maritime, Normandie, 2022-2023.
Saumons, truites, lamproies, anguilles... la faune de nos rivières est menacée. En cause notamment, la pollution, l'érosion, mais aussi les moulins, vannages et seuils qui ponctuent les cours d’eau et empêchent les poissons de circuler librement.
Le Syndicat Mixte du Bassin Versant de l’Arques coordonne des chantiers pour restaurer la continuité écologique sur les rivières de son territoire. Reportage à Ancourt, près de Dieppe, au moulin du Pontrancart, où il est question de restaurer la continuité écologique tout en préservant le patrimoine et les usages…
Les propriétaires d'ouvrages hydrauliques (moulins, vannages et seuils) ont l'obligation réglementaire de se mettre en conformité afin de permettre la restauration de la continuité écologique. Depuis 2012, le Syndicat Mixte du Bassin Versant de l'Arques accompagne ces propriétaires, dans leurs travaux de mise en conformité : techniquement, avec le conseil et le suivi de trois agents, mais aussi sur le plan financier, en leur permettant de bénéficier de subventions (Agence de l'Eau Seine-Normandie, Département 76).
Le site du Pontrancart se situe à Ancourt, près de Dieppe. Il comprend un château du XVIII - XIXe siècle et un moulin à eau, sur l'Eaulne, qui date du XIIIe siècle.
La présence d'ouvrages hydrauliques (vannages et moulin) sur le cours d'eau pose des problèmes de continuité écologique : les poissons ne peuvent pas remonter le cours d'eau pour se reproduire notamment, et les sédiments s'accumulent en amont des ouvrages.
Le Syndicat du Bassin Versant de l'Arques travaille en partenariat avec l'Agence de l'Eau Seine-Normandie et le Département de Seine-Maritime (financeurs), et avec l'appui des services de l'Etat (Police de l'eau, et Office Français de la Biodiversité). Ces chantiers permettent de retrouver une population des espèces cibles : ici principalement des salmonidés (truites de mer, truites fario, saumons) mais aussi anguilles, lamproies.
Ces espèces vont pouvoir remonter les cours d'eau et se reproduire dans des zones plus propices : granulométrie, profondeur plus favorables.
"La question de l'érosion de la biodiversité est un enjeu fondamental. On estime que depuis 1970 on a une perte de plus de 70% de la biodiversité", souligne Frédéric Weisz, président du Syndicat du Bassin versant de l'Arques.
Le chantier est conduit par Hydrosphère : "pour restaurer la continuité écologique, on va modifier la répartition des débits de l'Eaulne, qui est divisée en 3 bras au niveau du château, injecter plus de débit dans un des bras, qu'on rendra ainsi totalement franchissable pour la remontée des poissons et le transport sédimentaire", décrit Sandra Laboulandine, maître d'oeuvre (Hydropshère).
"Sur ce bras, on va proposer des caractéristiques hydromorphologiques spécifiques à l'Eaulne : un tracé méandriforme, une diversité de faciès d'écoulement, des variétés de milieux, des zones avec des hélophytes (plantes favorisant la présence des odonates, des amphibiens mais aussi idéales pour le nourrissage et le grossissement des poissons)".
La continuité écologique ne se joue pas à l'échelle d'un seul site, et n'a de sens que sur un ensemble plus large.
Le SMBV Arques entreprend des travaux de continuité écologique depuis 2012, principalement sur les trois cours d'eau de son territoire : Eaulne, Bethune et Varenne. Le site du Pontrancart est le 45e ouvrage en réhabilitation. Au total, on compte 160 sites à réhabiliter, cela concerne environ 230 ouvrages (un site pouvant comprendre plusieurs ouvrages). Les ouvrages prioritaires sont situés en aval. La priorité des ouvrages est réévaluée avec les services de l'Etat.
Le Syndicat du Bassin Versant de l'Arques est une structure publique intercommunale, qui comprend 118 communes, 8 communautés de communes.
Le projet est conçu dans le respect de l'existant. Sont pris en compte :
le patrimoine : ici très bien conservé puisque le moulin à eau est l'un des derniers du département encore en activité,
les usages : le moulin permettait l'action d'une pompe pour l'arrosage des jardins et l'abreuvement du bétail. Une pompe de forage permettra de remplir les cuves.
le cadre paysager : lors des travaux, très peu d'arbres ont été abattus, et seront replantées arbres, arbustes et plantes aquatiques
la faune : lors de la mise à sec des bras, des pêches de sauvetage permettent de remettre les poissons à l'eau.
Plus d'infos : www.bvarques.fr
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