Vos propos sont d’une cohérence et d’une bienveillance rare cher Monsieur Tisseron. Âge aujourd’hui de 51 ans, Tintin a été le camarade de mon enfance. Vous avez raison, l’épisode du Congo mériterait une petite préface, en indiquant précisément que ce n’était pas Hergé qui était raciste mais toute la vison occidentale d’alors qui était biaisée. Enfin, et je vous rejoins tout à fait, Tintin est un humain si bon qu’on le voudrait encore plus parfait! Il n’y a pas à retoucher une œuvre quelle qu’elle soit! Enfin, votre approche n’est pas une approche psychanalytique mais simplement… humaine! Merci Monsieur.
Très intéressante cette vidéo, merci ! Ce qu'il y a de bien avec Tintin c'est qu'on le lit avec un regard différent selon l'âge : enfant c'est l'aventure qui captive, adolescent on commence à s'intéresser aux différents contextes historiques des albums, et une fois adulte c'est ce qu'Hergé à transmit de lui-même dans son œuvre. Pour l'avertissement dans Tintin au Congo, je suis d'accord avec ça, bien qu'on peut en profiter pour en faire un outil pédagogique avec son enfant en lui expliquant la vision des gens de l'époque sur la colonisation. La Castafiore des bijoux de la Castafiore est aussi, pour moi, une caricature de Germaine Kieckens sa première femme. Sinon, petit rectificatif : Dans on a marché sur la Lune, c'est le colonel Boris alias Jorgen qui est aux prises avec Wolf.
Bonjour Dans le domaine de la recherche, quel que soit la discipline en cause, il existe des hypothèses plus ou moins probables. Ce qui fait la différence, au bout du compte, ce sont les preuves. Or, ce que j’ai écrit sur Tintin et Hergé a été confirmé de beaucoup de façons. Voici un bref historique pour vous éclairer. J’ai écrit, au début de 1982, un article intitulé « Haddock et la question du père dans les aventures de Tintin », pour la revue "Confrontation", qui contient l'essentiel de ce que j'ai développé par la suite. Mais je ne voulais pas le publier sans en informer Hergé, et j'envisageais même de ne pas le publier s’il s’y opposait. Je lui ai donc envoyé cet article, et en septembre, son secrétaire Alain Baran m’a répondu que Hergé était très malade (j'ai su après qu'il avait contacté le sida à la suite d’une transfusion sanguine), qu’il ne pouvait pas me répondre mais qu’il avait beaucoup apprécié mon texte qui, je cite, « lui avait beaucoup appris sur le créateur du personnage de Haddock ». Et il m’a invité à continuer mes travaux. Mon article a été publié au début de l’année 1983. Hergé est mort au mois de mars. J’ai continué à réfléchir sur les aventures de Tintin et j’ai écrit « Tintin chez le psychanalyste » en 1984 en développant mon article de 1982. Mon éditeur, les éditions Aubier, m’a proposé de demander une couverture originale aux ateliers Hergé, c'est à dire un dessin qui ne soit pas la reproduction d'une vignette ou d'un dessin de Hergé existant. J’ai dit que c’était inutile car aucun auteur d’un ouvrage sur Tintin n’en avait jamais eue, et aucun après moi n’en n'a d’ailleurs bénéficié non plus. Mais j’ai joué le jeu et j’ai envoyé aux ateliers Hergé ma demande. Quelques jours plus tard, j’ai reçu un appel téléphonique de Bob de Moor qui avait toujours accompagné Hergé dans ses créations et qui dessinait du "Tintin" aussi bien que lui. Il m’a dit que la veuve de Hergé, Fanny Remi, lui avait demandé de réaliser cette couverture originale, mais il se tournait vers moi car il n’avait aucune idée pour la dessiner. J’ai alors fait un brouillon que je lui ai envoyé et qu’il a reproduit dans le style de Hergé. Je m’étais hasardé à mettre en scène Freud déguisé en Chevalier de Haddock, et à mon grand étonnement, il n’y a eu aucune protestation des ateliers Hergé pour réaliser cette couverture bien que je me sois permis d’introduire un personnage que Hergé n'avait jamais mis en scène. Mon brouillon et le dessin envoyé par Bob de Moor sont maintenant déposés à la Bibliothèque nationale de France puisque la BNF m’a proposé de faire don de mes archives lorsqu’elle m’a rendu un hommage d’une journée le 30 novembre 2019. Le dessin déposé à la BNF est d’ailleurs différent de la couverture car j’avais donné à Bob de Moor une image de Freud peu connue, de la collection Marie Bonaparte, sur lequel il a un visage très détendu. Bob de Moor a trouvé que cela ne correspondait pas à l’idée que chacun se faisait de Freud et a reproduit sur le définitif de la couverture le visage torturé de Freud en proie son cancer à la fin de sa vie. Ces dessins sont reproduits sur mon site (sergetisseron.com) Quelques mois plus tard, il y a eu une exposition Hergé au centre Pompidou et j’ai rencontré sa veuve. Elle est venue vers moi et m’a félicité d'avoir découvert le secret familial de son mari uniquement à partir de la lecture des Aventures de Tintin. Deux ans plus tard, en 1987, deux biographes, Thierry Smolderen et Pierre Sterckx, ont confirmé par l'étude de documents généalogiques l'existence de ce secret tel que je le décris dans "Tintin chez le psychanalyste". Mais bien entendu, ce que j'avais découvert n'est pas la réalité, mais la représentation que le petit Hergé s'était fabriquée d'une situation mystérieuse, et qu'il a retranscrit dans son œuvre, en grand partie à son insu comme je l'ai écrit. Serge Tisseron
Merci M. Tisseron pour ces enrichissantes précisions. Nul doute que vous avez fait un travail de recherche et d'analyse en profondeur et cela est remarquable et tient la route dans son ensemble. Je suis toujours un peu rébarbatif quand je vois des publications qui intellectualisent à l’excès l’oeuvre génial de Hergé, comme si cela me sortait du l'univers réconfortant dans lequel j'aime me replonger sans cesse, depuis l'âge de raison (j'ai maintenant 61 ans), comme si le rationnel cherchait à extraire la pépite de merveilleux que l'on retrouve dans la plupart des albums de Tintin. Mais j'ai senti que cela n'était pas votre intention et même qu'avec votre analyse on replonge encore plus profondément dans les abîmes de l'inconscient du dessinateur. J'ai lu plusieurs excellentes biographies sur Hergé et certains biographes n'ont fait qu'effleurer le sujet du secret familial. J’ai pu voir sur youtube, suite à votre exposé sur la même plateforme, la conférence de madame Pactat (qui vous cite en début d’exposé) et tout cela est fort enrichissant, même s’il peut y avoir ici et là quelques inexactitudes. Bonne continuation ! Dave, un passionné québécois de Tintin.
Pourriez-vous corriger les fautes d’orthographe qui parsèment le questionnaire ? Hergé mettait un point d’honneur à manipuler correctement la langue française. Merci.
Vos propos sont d’une cohérence et d’une bienveillance rare cher Monsieur Tisseron. Âge aujourd’hui de 51 ans, Tintin a été le camarade de mon enfance. Vous avez raison, l’épisode du Congo mériterait une petite préface, en indiquant précisément que ce n’était pas Hergé qui était raciste mais toute la vison occidentale d’alors qui était biaisée.
Enfin, et je vous rejoins tout à fait, Tintin est un humain si bon qu’on le voudrait encore plus parfait!
Il n’y a pas à retoucher une œuvre quelle qu’elle soit!
Enfin, votre approche n’est pas une approche psychanalytique mais simplement… humaine!
Merci Monsieur.
Merci pour ce très bel entretien 😊
Très intéressante cette vidéo, merci ! Ce qu'il y a de bien avec Tintin c'est qu'on le lit avec un regard différent selon l'âge : enfant c'est l'aventure qui captive, adolescent on commence à s'intéresser aux différents contextes historiques des albums, et une fois adulte c'est ce qu'Hergé à transmit de lui-même dans son œuvre.
Pour l'avertissement dans Tintin au Congo, je suis d'accord avec ça, bien qu'on peut en profiter pour en faire un outil pédagogique avec son enfant en lui expliquant la vision des gens de l'époque sur la colonisation.
La Castafiore des bijoux de la Castafiore est aussi, pour moi, une caricature de Germaine Kieckens sa première femme.
Sinon, petit rectificatif : Dans on a marché sur la Lune, c'est le colonel Boris alias Jorgen qui est aux prises avec Wolf.
Cmoi
Intéressante analyse. Mais tout cela reste des hypothèses, certaines étant assez farfelus.
Bonjour
Dans le domaine de la recherche, quel que soit la discipline en cause, il existe des hypothèses plus ou moins probables. Ce qui fait la différence, au bout du compte, ce sont les preuves. Or, ce que j’ai écrit sur Tintin et Hergé a été confirmé de beaucoup de façons. Voici un bref historique pour vous éclairer. J’ai écrit, au début de 1982, un article intitulé « Haddock et la question du père dans les aventures de Tintin », pour la revue "Confrontation", qui contient l'essentiel de ce que j'ai développé par la suite. Mais je ne voulais pas le publier sans en informer Hergé, et j'envisageais même de ne pas le publier s’il s’y opposait. Je lui ai donc envoyé cet article, et en septembre, son secrétaire Alain Baran m’a répondu que Hergé était très malade (j'ai su après qu'il avait contacté le sida à la suite d’une transfusion sanguine), qu’il ne pouvait pas me répondre mais qu’il avait beaucoup apprécié mon texte qui, je cite, « lui avait beaucoup appris sur le créateur du personnage de Haddock ». Et il m’a invité à continuer mes travaux.
Mon article a été publié au début de l’année 1983. Hergé est mort au mois de mars. J’ai continué à réfléchir sur les aventures de Tintin et j’ai écrit « Tintin chez le psychanalyste » en 1984 en développant mon article de 1982. Mon éditeur, les éditions Aubier, m’a proposé de demander une couverture originale aux ateliers Hergé, c'est à dire un dessin qui ne soit pas la reproduction d'une vignette ou d'un dessin de Hergé existant. J’ai dit que c’était inutile car aucun auteur d’un ouvrage sur Tintin n’en avait jamais eue, et aucun après moi n’en n'a d’ailleurs bénéficié non plus. Mais j’ai joué le jeu et j’ai envoyé aux ateliers Hergé ma demande. Quelques jours plus tard, j’ai reçu un appel téléphonique de Bob de Moor qui avait toujours accompagné Hergé dans ses créations et qui dessinait du "Tintin" aussi bien que lui. Il m’a dit que la veuve de Hergé, Fanny Remi, lui avait demandé de réaliser cette couverture originale, mais il se tournait vers moi car il n’avait aucune idée pour la dessiner. J’ai alors fait un brouillon que je lui ai envoyé et qu’il a reproduit dans le style de Hergé. Je m’étais hasardé à mettre en scène Freud déguisé en Chevalier de Haddock, et à mon grand étonnement, il n’y a eu aucune protestation des ateliers Hergé pour réaliser cette couverture bien que je me sois permis d’introduire un personnage que Hergé n'avait jamais mis en scène. Mon brouillon et le dessin envoyé par Bob de Moor sont maintenant déposés à la Bibliothèque nationale de France puisque la BNF m’a proposé de faire don de mes archives lorsqu’elle m’a rendu un hommage d’une journée le 30 novembre 2019. Le dessin déposé à la BNF est d’ailleurs différent de la couverture car j’avais donné à Bob de Moor une image de Freud peu connue, de la collection Marie Bonaparte, sur lequel il a un visage très détendu. Bob de Moor a trouvé que cela ne correspondait pas à l’idée que chacun se faisait de Freud et a reproduit sur le définitif de la couverture le visage torturé de Freud en proie son cancer à la fin de sa vie. Ces dessins sont reproduits sur mon site (sergetisseron.com)
Quelques mois plus tard, il y a eu une exposition Hergé au centre Pompidou et j’ai rencontré sa veuve. Elle est venue vers moi et m’a félicité d'avoir découvert le secret familial de son mari uniquement à partir de la lecture des Aventures de Tintin. Deux ans plus tard, en 1987, deux biographes, Thierry Smolderen et Pierre Sterckx, ont confirmé par l'étude de documents généalogiques l'existence de ce secret tel que je le décris dans "Tintin chez le psychanalyste". Mais bien entendu, ce que j'avais découvert n'est pas la réalité, mais la représentation que le petit Hergé s'était fabriquée d'une situation mystérieuse, et qu'il a retranscrit dans son œuvre, en grand partie à son insu comme je l'ai écrit.
Serge Tisseron
Merci M. Tisseron pour ces enrichissantes précisions. Nul doute que vous avez fait un travail de recherche et d'analyse en profondeur et cela est remarquable et tient la route dans son ensemble. Je suis toujours un peu rébarbatif quand je vois des publications qui intellectualisent à l’excès l’oeuvre génial de Hergé, comme si cela me sortait du l'univers réconfortant dans lequel j'aime me replonger sans cesse, depuis l'âge de raison (j'ai maintenant 61 ans), comme si le rationnel cherchait à extraire la pépite de merveilleux que l'on retrouve dans la plupart des albums de Tintin. Mais j'ai senti que cela n'était pas votre intention et même qu'avec votre analyse on replonge encore plus profondément dans les abîmes de l'inconscient du dessinateur. J'ai lu plusieurs excellentes biographies sur Hergé et certains biographes n'ont fait qu'effleurer le sujet du secret familial. J’ai pu voir sur youtube, suite à votre exposé sur la même plateforme, la conférence de madame Pactat (qui vous cite en début d’exposé) et tout cela est fort enrichissant, même s’il peut y avoir ici et là quelques inexactitudes. Bonne continuation ! Dave, un passionné québécois de Tintin.
Vous avez sûrement fait des recherches très approfondies pour écrire cela. J'admire votre rigueur intellectuelle.
Merci beaucoup ! Orthophoniste, je m’en sers beaucoup...
Pourriez-vous corriger les fautes d’orthographe qui parsèment le questionnaire ? Hergé mettait un point d’honneur à manipuler correctement la langue française. Merci.
Pas d'homosexualité dans Tintin ???
Des exemples svp, pour appuyer vos dires. Si c'est le lien d'amitié de Tintin avec le capitaine qui vous fait fantasmer, ça c'est autre chose.