« La suture se comprend mieux à travers la considération de ce qui est en jeu dans le processus de « lecture » du film. Les propriétés de l'image qui s'y manifestent et qui sont révélées notamment par le cinéma "subjectif" sont actuellement moins contestées que refoulées (de sorte qu'elles sont ensuite souvent "révélées" dans les recherches de jeunes cinéastes comme Pollet). Ces caractéristiques font que le cinéma engendre lui-même le cinématique, que l'image entre d'elle-même dans l'ordre du signifiant et que par et dans ce processus de lecture se déterminent les propriétés, les conditions et les limites de sa puissance signifiante. Une telle reconnaissance devrait impliquer une fois de plus de questionner les problèmes théoriques du cinéma et de la signification au cinéma. Comprendre cela exige de lire l'image à son détriment, une lecture avec laquelle le cinéma contemporain nous a parfois fait perdre la familiarité, car son utilisation d'images sans profondeur cache ce que le cinéma de profondeur de champ a toujours révélé : que tout champ filmique tracé par la caméra et tous les objets révélés par la profondeur de champ - même dans un plan fixe - sont.» Oudart, Jean-Pierre. "Cinéma et suture." CAHIERS DU CINEMA 211 et 212 (1969). « 22. Cette incompatibilité entre un film qui ne peut excéder une certaine durée et un sens qui peut être réaffirmé par un rien a donné lieu à des solutions de compromis qui ont toutes pris la forme de coups de force, seuls qui pouvaient mettre fin à la chaîne, capitaliser sur ses liens et les réactiver dans le sens d'une prédiction du passé. On peut reconnaître là la préoccupation majeure de plusieurs films célèbres qui semblaient modernes à leurs défenseurs dans les Cahiers vers 1955 ; films miracles ou, comme l'a justement observé Jacques Rivette, films du renversement final, qui ont réussi à représenter à la fois l'état le plus avancé de la réflexion sur le cinéma et une manière souvent religieuse de rendre compte de cette réflexion. Pourquoi ? Parce qu'un tel pouvoir (le pouvoir intrusif) (le pouvoir de l'écriture) ne pouvait se maintenir qu'en introduisant une garantie, un signifié transcendantal, dont le cinéma avait peu à peu appris à se passer, le laissant aux films publicitaires dont il a toujours été la vérité. (« Salador. ») .» - “ Travail, lecture, jouissance " de Serge Daney et Jean-Pierre Oudart dans Cahiers du cinéma, n° 222, juillet 1970. Messieurs, merci encore pour une autre superbe émission.
L'arrière-cuisine des Cahiers, toute une histoire ! Passionnant décorticage du texte sur Truman Capote entre les secrets d'élaboration, l'analyse du style et les clés de lecture. L'entraperçu de la thématique du voyage chez Daney qui irrigue ses écrits qui attise et tease la prochaine émission et le livre d'Emmanuel. Merci à nouveau pour cette foisonnante conversation.
Meilleur moment -> 19:14
Un échange passionné autour de Bataille et Blanchot à 2:30:00!
« La suture se comprend mieux à travers la considération de ce qui est en jeu dans le processus de « lecture » du film. Les propriétés de l'image qui s'y manifestent et qui sont révélées notamment par le cinéma "subjectif" sont actuellement moins contestées que refoulées (de sorte qu'elles sont ensuite souvent "révélées" dans les recherches de jeunes cinéastes comme Pollet). Ces caractéristiques font que le cinéma engendre lui-même le cinématique, que l'image entre d'elle-même dans l'ordre du signifiant et que par et dans ce processus de lecture se déterminent les propriétés, les conditions et les limites de sa puissance signifiante. Une telle reconnaissance devrait impliquer une fois de plus de questionner les problèmes théoriques du cinéma et de la signification au cinéma. Comprendre cela exige de lire l'image à son détriment, une lecture avec laquelle le cinéma contemporain nous a parfois fait perdre la familiarité, car son utilisation d'images sans profondeur cache ce que le cinéma de profondeur de champ a toujours révélé : que tout champ filmique tracé par la caméra et tous les objets révélés par la profondeur de champ - même dans un plan fixe - sont.» Oudart, Jean-Pierre. "Cinéma et suture." CAHIERS DU CINEMA 211 et 212 (1969).
« 22. Cette incompatibilité entre un film qui ne peut excéder une certaine durée et un sens qui peut être réaffirmé par un rien a donné lieu à des solutions de compromis qui ont toutes pris la forme de coups de force, seuls qui pouvaient mettre fin à la chaîne, capitaliser sur ses liens et les réactiver dans le sens d'une prédiction du passé. On peut reconnaître là la préoccupation majeure de plusieurs films célèbres qui semblaient modernes à leurs défenseurs dans les Cahiers vers 1955 ; films miracles ou, comme l'a justement observé Jacques Rivette, films du renversement final, qui ont réussi à représenter à la fois l'état le plus avancé de la réflexion sur le cinéma et une manière souvent religieuse de rendre compte de cette réflexion. Pourquoi ? Parce qu'un tel pouvoir (le pouvoir intrusif) (le pouvoir de l'écriture) ne pouvait se maintenir qu'en introduisant une garantie, un signifié transcendantal, dont le cinéma avait peu à peu appris à se passer, le laissant aux films publicitaires dont il a toujours été la vérité. (« Salador. ») .» - “ Travail, lecture, jouissance " de Serge Daney et Jean-Pierre Oudart dans Cahiers du cinéma, n° 222, juillet 1970.
Messieurs, merci encore pour une autre superbe émission.
L'arrière-cuisine des Cahiers, toute une histoire ! Passionnant décorticage du texte sur Truman Capote entre les secrets d'élaboration, l'analyse du style et les clés de lecture. L'entraperçu de la thématique du voyage chez Daney qui irrigue ses écrits qui attise et tease la prochaine émission et le livre d'Emmanuel. Merci à nouveau pour cette foisonnante conversation.