je n'ai jamais commenté de videos, mais vraiment là je pense que je suis obligée au moins pour donner un peu de force à l'algorithme- je suis vraiment étonnée du peu de vue de cette video qui est réellement très intéressante et bien réalisée, j'espère revoir très vite de gros projets de votre part comme celui-ci.
Merci infiniment, je suis vraiment très touché par votre retour ! Et j'ai effectivement grand besoin d'un petit coup de pouce algorithmique 😁 J'espère pouvoir sortir une prochaine vidéo de ce type à la rentrée...
Je suis absolument en désaccord avec beaucoup de choses exposées dans cette vidéo, mais plutôt heureux de voir un avis articulé et étayé de cette manière. Car la manière est excellente : ton, formulation, développement... On est loin de certaines prises de position hystériques prises à grand renfort d'images tremblées et de raccourcis sémantiques. J'applaudis donc, et je m'abonne dans le même mouvement !
Je suis très touché par votre message, c'est un compliment qui honore autant celui qui le formule que celui qui le reçoit. Si vous avez le loisir m'écrire encore, je serais évidemment très curieux de connaître votre pensée sur les questions que j'aborde dans cette vidéo. Merci infiniment pour votre retour !
Bravo pour cette vidéo de qualité, avec des explications claires ainsi qu’un point de vue plus que pertinent. Espérons que nous ayons touché le fond pour mieux rebondir !
Merci beaucoup ! J'ai l'impression que pour le moment, on continue à s'enliser... Je garde une foi inébranlable dans le génie humain, mais je pense que la renaissance prendra du temps, un temps qui se compte davantage en siècles qu'en années... A nous d'accepter notre sort avec humilité, de protéger la flamme sans profiter de sa chaleur et de la maintenir vivace pour les générations futures.
Beaucoup de choses très intéressantes dans cette vidéo, mais également quelques inexactitudes sur lesquelles j’aimerais revenir : - Le surréalisme est loin d’être le 1er mouvement à rompre avec la trinité platonicienne du beau, du bien et du vrai. Tout d’abord, il y a toujours eu une dialectique entre séduisant et repoussant dans l’art ; pour s’en rendre compte, il suffit de regarder une cathédrale gothique : on y trouve autant de formes harmonieuses que de monstruosités grotesques. S’il y a vraiment une rupture, celle-ci s’opère davantage au XIXe siècle et ce à travers divers mouvements contradictoires. Ainsi, le Romantisme introduit l’idée que les passions doivent prendre le dessus sur la raison et que le sublime remplace le beau, ce qui se caractérise par l’introduction nécessaire du laid (voir la préface de Cromwell de Victor Hugo). Il y a ensuite l’esthétisme qui, en réponse au romantisme, défend un art uniquement beau qui ne se préoccupe ni de bien ni de vérité. Cette posture, d’abord défendue par Gautier se retrouve ensuite chez Baudelaire, chez les parnassiens puis les symbolistes pour finalement devenir presque la doxa des artistes Fin-de-siècle. - Le surréalisme n’est pas, à mon sens, un mouvement négatif comme Dada. Selon Breton, si l’artiste surréaliste ne doit pas se préoccuper de questions morales et esthétiques lors du processus de création, l’état d’hypnose ou d’inconscience dans lequel il crée permet de faire surgir ce qu’il appelle “le merveilleux”. En soit Breton ne prêche pas la mort de la beauté mais plutôt l’avènement d’une nouvelle beauté oxymorique : “explosante-fixe”, et “magique-circonstancielle” comme il l’explique dans l’Amour fou. - Le dédain de la beauté dans l’art contemporain n’est pas le fait des surréalistes ; d’ailleurs les peintures d’artistes comme Ernst, Brauner ou Dali sont magnifiques. En réalité, ce sont les artistes conceptuels qui, à partir des années 60, ont donné lieu à la doxa actuelle d’un art où l’œuvre se caractérise par le processus et non le résultat. D’ailleurs, malgré son influence inestimable, le surréalisme a longtemps été ringardisé par les artistes contemporains. Il reste même encore assez méprisé aujourd’hui dans les écoles d’art. - La multiplication des imposteurs dans l’art, elle non plus, n’est pas due au surréalisme. C’est davantage une conséquence de la société de masse qui a tendance à valoriser le succès commercial avant tout. D’ailleurs, il y avait déjà beaucoup d’imposteurs dans l’art au XIXe et au XXe siècle, mais pour beaucoup, l’histoire ne les a pas retenus. - La vidéo montre beaucoup de peintures de Picasso. Or, même si celui-ci fréquentait les surréalistes, il n’était en aucun cas membre du groupe et n’avait pas vraiment les mêmes préoccupations que Breton. Ce qui animait l’art de Picasso, c’était avant tout une quête formelle dans la continuité de Cézanne. - Enfin, je suis pour ma part convaincu que l’art n’a pas à se soucier du vrai ; les œuvres les plus brillantes sont, à mon sens, celles qui s’éloignent le plus du réel. En voici quelques exemples : le Sonnet en -x de Mallarmé, les Chimères de Nerval, les portraits de Khnopff, les peintures suprématistes de Malevitch… (pour le coup, ce n’est que mon avis). Désolé pour le pavé et bravo pour cette vidéo qui a dû demander beaucoup de travail !
Merci infiniment pour votre retour, pour la profondeur de vos remarques et pour la qualité de votre argumentation ! Je ne vous rejoins pas du tout sur le premier point. Il y a à mon sens, aussi bien dans l'art gothique que dans les mouvements du XIXe que vous citez une volonté permanente d'atteindre l'idéal platonicien. Et pour ma part, je n'entends pas les théories de Gautier comme une volonté de s'affranchir des concepts moraux mais bien comme une volonté de les redéfinir plus justement (exactement comme le feront les impressionnistes par la suite). Toutefois, vous avez raison sur le fond : le XIXe est le siècle de la rupture. Je persiste néanmoins à penser que cette rupture là remettait davantage en cause une habitude (dans le sens péjoratif) plutôt qu'une tradition, tandis que la rupture qui s'opère au XXe est beaucoup plus profonde. Hugo, Gautier, ou après eux Rodin ou Manet étaient à mon avis essentiellement soucieux d’échapper aux manières, pour ne pas dire au maniérisme, du XVIIIe, et de retrouver l'approche plus "authentique", à la fois plus libre dans son expression et plus soumise dans sa conception, des artistes de la renaissance et du moyen âge. Ce qui suppose, entre autre, de considérer le laid comme un instant du beau, et le faux comme un instant du vrai. Je partage votre opinion quand à Breton. Je pense qu'il exprimait maladroitement (d'un point de vue sémantique et logique) ses idées, et que certaines de ses assertions les plus provocantes n'étaient que des postures, qui n'enlèvent rien à sa sincérité et à sa bonne volonté, quoi que son œuvre, à mes yeux, n'atteigne à aucune grandeur. En effet, les surréalistes ne sont pas responsables du triomphe de la laideur qui est le fait de notre époque, tout comme Schoenberg n'est pas responsable des atrocités commises par Boulez et consorts. Je maintiens cependant qu'ils ont franchi, selon moi, un point de non retour qui a ouvert la voie à une attitude nonchalante et surtout désinvolte vis à vis de la chose artistique. Mais je vous entends par ailleurs sur les autres points. Bien sûr, il y a eu des imposteurs à toutes les époques (le XVIIIe m'en semble encore plus fécond que le XIXe), mais ces imposteurs la connaissaient au moins leur métier. Ce n'est plus forcément le cas après les surréalistes, qui ont laissé dans l'inconscient collectif l'idée que la maîtrise technique n'est pas une condition impérative à la réalisation d’œuvres d'art (bien qu'eux-mêmes étaient pour la plupart d'excellents techniciens). Vous avez raison. J'ai utilisé beaucoup de ses œuvres car elle permettaient une illustration aisée et parlante de mon propos, mais c'était une facilité et un raccourci approximatif de ma part. Je suis par contre en complet désaccord avec vous sur le dernier point. Du moins, je crois que le vrai, bien qu'il soit périlleux d'appliquer ce concept à une démarche artistique, est toujours la finalité ultime d'une œuvre. Bien entendu, il ne s'agit pas d'un vrai littéral ou scientifique, encore moins réaliste. J'ai regretté de n'avoir pas cité Boris Vian comme un héritier heureux des préceptes surréalistes. "Cette histoire est vraie puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre" écrivait-il... C'est dans ce sens que je conçois la vérité en art. Il est toutefois difficile pour moi de résumer ma pensée sur des sujets aussi complexes en quelques mots... Et je suis à peu près certain que si l'occasion nous était offerte de discuter de vive voix, nous tomberions d’accord sur certains des points qui nous opposent en apparence. Encore une fois : merci d'avoir pris le temps d'exprimer si finement votre pensée, comptez sur moi pour approfondir avec toute la bonne foi dont je suis capable les questions et les objections que vous soulevez.
@@Sham-Makdessi Merci pour cette réponse aussi complète qu’intéressante ! J’ai peut-être un peu radicalisé mon premier point sur le XIXe siècle ; il n’empêche que plusieurs grands artistes et penseurs ont explicitement formulé un éloge du faux et/ou une critique du bien : Baudelaire avec les Fleurs du mal, Lautréamont avec les Chants de Maldoror, Nietzsche dans à peu près toutes ses œuvres et Mallarmé qui, dans ses correspondances avec Cazalis, définit l’art comme le “mensonge suprême” (expression laudative de sa part). Pour le reste, je suis globalement d’accord avec vous, sauf sur la finalité de l’art. Mais là, on touche une notion très subjective donc je n’essaierai pas de vous convaincre. La citation de Boris Vian est brillante en tout cas, cette conception du vrai se rapproche en effet davantage de mes préoccupations esthétiques. Bravo encore pour votre vidéo, je reste à l’affût de vos prochaines sorties !
@@elsewheremusic1815 Vous avez formellement raison. Ça me fait penser aussi à Sacha Guitry qui disait que jouer la comédie, c'est mentir. Je reste toutefois persuadé que les artistes que vous citez (à l'exception de Nietzsche) luttaient davantage contre le "bien - ou le vrai - académique" que contre l'idée platonicienne de ces concepts... Mais comme je vous le disais, je vais de ce pas me replonger dans la question pour affiner ma réflexion à la lumière de vos remarques. Merci encore pour ces échanges captivants !
16:19 : il existe des personnes qui n'ont pas de dialogue intérieur, elles ne peuvent pas entendre de voix et donc de mots. La réalité est traduite différemment pour elles, la réflexion construite autrement, donc il est possible de s'affranchir des mots pour raisonner.
Merci pour votre retour et votre réflexion :) C'est une question cruciale, et le point de vue que je défends (la pensée comme conséquence de la parole) n'est certes pas unanimement partagé. Je crois néanmoins qu'on ne peut pas raisonner sans les mots, car la raison, pour se déployer, nécessite un référentiel qui puisse être partagé, et ce référentiel est justement la parole. Pour le dire autrement, et essayer de mieux me faire comprendre, je crois que la pensée nait du dialogue. je crois qu'il faut être au moins deux pour que la pensée, par le biais de la parole, puisse éclore. Bien sûr, il ne faut pas confondre le concept de conscience, qui peut se passer de la parole, et celui de pensée ou plus précisément de raisonnement, qui lui, en tous cas de mon point de vue, reste enchâssé dans le processus de la parole. De la même manière, et dans l'espoir que ce parallèle puisse vous éclairer sur ma vision des choses, j'imagine qu'il est possible d'avoir conscience de quantité ou de rapports sans utiliser les chiffres ou le concept de numérotation, mais seul la connaissance de l’arithmétique permettra un "raisonnement" mathématique poussé. Au plaisir de vous lire, et merci encore pour l'intérêt que vous avez porté à mon travail :)
@@Sham-Makdessi je vous en prie, la vidéo était très bien, je voulais juste apporter une nuance/ouverture parce que cela m'a frappé en entendant votre raisonnement mais ce n'est pas une opposition à votre point de vue. Les mots et les lettres ne sont jamais que des symboles. Je pense qu'il est possible de raisonner en formes, en couleurs, en mouvement autrement que par les mots, c'était là ma nuance aussi. Par exemple il existe des personnes sourdes et aveugles qui utilisent une langue en collant leurs mains à celles de leur interlocuteur qui ensuite réalise des mouvements de main que la personne traduit grâce au toucher et au mouvement. Comment est utilisée la représentation mentale de ces personnes en tant que conscience, pensée et traduction de leur pensée ? En fait tout dépend de comment on interprète le mot "raisonnement", s'il se limite à la construction de la pensée, ou à une forme de logique en dehors de la pensée, beaucoup plus accrochée aux perceptions internes. En tout cas j'ai trouvé la pluralité des approches très intéressantes dans cette vidéo, c'est rare d'avoir une telle transversalité dans des domaines qui pourtant se complètent.
Le surréalisme a beaucoup été récupéré par la publicité. Ce n'était pas le but mais c'est arrivé. Dans l'art surtout actuellement il existe beaucoup dimposteurs .
Très juste, je n'y avais pas pensé. Et oui, c'est clair, on est envahi par les imposteurs, aussi bien en musique, en peinture qu'en littérature... Il est plus que temps d'arrêter de subir cette situation, quoi que je n'ai malheureusement pas de solution miracle. Mais on peut au moins commencer par le dire et par le démontrer de manière argumentée :)
Le fait que Marcel Duchamp n' a pas une place dans ce documentaire me fait dire que les auteurs n' ont rien compris à l' histoire de l' art du 20ime siècle...!!
Merci pour votre retour. L'auteur, il n'y en a qu'un, attend avec impatience de lire le développement de votre pensée sur cette question, dans l'espoir de guérir, grâce à vos éclaircissements, cette incompréhension totale de l'histoire de l'art dont vous l'accusez de pâtir.
Merci pour le message. ZARPÕ. depuis la Vendée
Avec plaisir :)
je n'ai jamais commenté de videos, mais vraiment là je pense que je suis obligée au moins pour donner un peu de force à l'algorithme- je suis vraiment étonnée du peu de vue de cette video qui est réellement très intéressante et bien réalisée, j'espère revoir très vite de gros projets de votre part comme celui-ci.
Merci infiniment, je suis vraiment très touché par votre retour ! Et j'ai effectivement grand besoin d'un petit coup de pouce algorithmique 😁
J'espère pouvoir sortir une prochaine vidéo de ce type à la rentrée...
Géantissime.... la voix, le debit, le contenu vachement intéressant
Merci beaucoup, c'était un gros boulot à réaliser :)
Je suis absolument en désaccord avec beaucoup de choses exposées dans cette vidéo, mais plutôt heureux de voir un avis articulé et étayé de cette manière. Car la manière est excellente : ton, formulation, développement... On est loin de certaines prises de position hystériques prises à grand renfort d'images tremblées et de raccourcis sémantiques. J'applaudis donc, et je m'abonne dans le même mouvement !
Je suis très touché par votre message, c'est un compliment qui honore autant celui qui le formule que celui qui le reçoit. Si vous avez le loisir m'écrire encore, je serais évidemment très curieux de connaître votre pensée sur les questions que j'aborde dans cette vidéo.
Merci infiniment pour votre retour !
Bravo pour cette vidéo de qualité, avec des explications claires ainsi qu’un point de vue plus que pertinent. Espérons que nous ayons touché le fond pour mieux rebondir !
Merci beaucoup !
J'ai l'impression que pour le moment, on continue à s'enliser... Je garde une foi inébranlable dans le génie humain, mais je pense que la renaissance prendra du temps, un temps qui se compte davantage en siècles qu'en années... A nous d'accepter notre sort avec humilité, de protéger la flamme sans profiter de sa chaleur et de la maintenir vivace pour les générations futures.
Vraiment intéressant. Merci Deep Web TV pour du contenu toujours de très haute qualité 😀👍🏻
Merci beaucoup, cher ami 😘
Un grand moment de culture qui permet une compréhension globale ,stimulante . Quel plaisir d'apprendre grâce au talent de l'artiste !
Merci beaucoup pour ces encouragements :)
Putain de classe de maître!Vraiment une super vidéo ! Bravo!
Merci mille fois ! Ça fait vraiment plaisir :)
Tout à fait passionnant et juste ! ...c'est rassurant ...l'avenir promet d'être radieux...et vive le retour de la Beauté !
On l'appelle de tous nos vœux ! Merci beaucoup :)
@@Sham-Makdessi " l'avenir promet d'être radieux " ...c'est ta conclusion qui m'a enflammée...;-)
@@LornSadeSingularis 😁 J'ai quand même essayé de finir sur une note positive ...
suuuperbe !!!!!
Merci infiniment !
Bravo Sham
Merci, Ulrich :) C'est un peu grâce à toi que cette vidéo a vu le jour !
Classe ton coup de gueule!
Oui l’art est un savoir faire et toi tu l’as
Chapeau l’artiste
Merci Béa :)
Beaucoup de choses très intéressantes dans cette vidéo, mais également quelques inexactitudes sur lesquelles j’aimerais revenir :
- Le surréalisme est loin d’être le 1er mouvement à rompre avec la trinité platonicienne du beau, du bien et du vrai. Tout d’abord, il y a toujours eu une dialectique entre séduisant et repoussant dans l’art ; pour s’en rendre compte, il suffit de regarder une cathédrale gothique : on y trouve autant de formes harmonieuses que de monstruosités grotesques. S’il y a vraiment une rupture, celle-ci s’opère davantage au XIXe siècle et ce à travers divers mouvements contradictoires. Ainsi, le Romantisme introduit l’idée que les passions doivent prendre le dessus sur la raison et que le sublime remplace le beau, ce qui se caractérise par l’introduction nécessaire du laid (voir la préface de Cromwell de Victor Hugo). Il y a ensuite l’esthétisme qui, en réponse au romantisme, défend un art uniquement beau qui ne se préoccupe ni de bien ni de vérité. Cette posture, d’abord défendue par Gautier se retrouve ensuite chez Baudelaire, chez les parnassiens puis les symbolistes pour finalement devenir presque la doxa des artistes Fin-de-siècle.
- Le surréalisme n’est pas, à mon sens, un mouvement négatif comme Dada. Selon Breton, si l’artiste surréaliste ne doit pas se préoccuper de questions morales et esthétiques lors du processus de création, l’état d’hypnose ou d’inconscience dans lequel il crée permet de faire surgir ce qu’il appelle “le merveilleux”. En soit Breton ne prêche pas la mort de la beauté mais plutôt l’avènement d’une nouvelle beauté oxymorique : “explosante-fixe”, et “magique-circonstancielle” comme il l’explique dans l’Amour fou.
- Le dédain de la beauté dans l’art contemporain n’est pas le fait des surréalistes ; d’ailleurs les peintures d’artistes comme Ernst, Brauner ou Dali sont magnifiques. En réalité, ce sont les artistes conceptuels qui, à partir des années 60, ont donné lieu à la doxa actuelle d’un art où l’œuvre se caractérise par le processus et non le résultat. D’ailleurs, malgré son influence inestimable, le surréalisme a longtemps été ringardisé par les artistes contemporains. Il reste même encore assez méprisé aujourd’hui dans les écoles d’art.
- La multiplication des imposteurs dans l’art, elle non plus, n’est pas due au surréalisme. C’est davantage une conséquence de la société de masse qui a tendance à valoriser le succès commercial avant tout. D’ailleurs, il y avait déjà beaucoup d’imposteurs dans l’art au XIXe et au XXe siècle, mais pour beaucoup, l’histoire ne les a pas retenus.
- La vidéo montre beaucoup de peintures de Picasso. Or, même si celui-ci fréquentait les surréalistes, il n’était en aucun cas membre du groupe et n’avait pas vraiment les mêmes préoccupations que Breton. Ce qui animait l’art de Picasso, c’était avant tout une quête formelle dans la continuité de Cézanne.
- Enfin, je suis pour ma part convaincu que l’art n’a pas à se soucier du vrai ; les œuvres les plus brillantes sont, à mon sens, celles qui s’éloignent le plus du réel. En voici quelques exemples : le Sonnet en -x de Mallarmé, les Chimères de Nerval, les portraits de Khnopff, les peintures suprématistes de Malevitch… (pour le coup, ce n’est que mon avis).
Désolé pour le pavé et bravo pour cette vidéo qui a dû demander beaucoup de travail !
Merci infiniment pour votre retour, pour la profondeur de vos remarques et pour la qualité de votre argumentation !
Je ne vous rejoins pas du tout sur le premier point. Il y a à mon sens, aussi bien dans l'art gothique que dans les mouvements du XIXe que vous citez une volonté permanente d'atteindre l'idéal platonicien. Et pour ma part, je n'entends pas les théories de Gautier comme une volonté de s'affranchir des concepts moraux mais bien comme une volonté de les redéfinir plus justement (exactement comme le feront les impressionnistes par la suite).
Toutefois, vous avez raison sur le fond : le XIXe est le siècle de la rupture. Je persiste néanmoins à penser que cette rupture là remettait davantage en cause une habitude (dans le sens péjoratif) plutôt qu'une tradition, tandis que la rupture qui s'opère au XXe est beaucoup plus profonde.
Hugo, Gautier, ou après eux Rodin ou Manet étaient à mon avis essentiellement soucieux d’échapper aux manières, pour ne pas dire au maniérisme, du XVIIIe, et de retrouver l'approche plus "authentique", à la fois plus libre dans son expression et plus soumise dans sa conception, des artistes de la renaissance et du moyen âge.
Ce qui suppose, entre autre, de considérer le laid comme un instant du beau, et le faux comme un instant du vrai.
Je partage votre opinion quand à Breton. Je pense qu'il exprimait maladroitement (d'un point de vue sémantique et logique) ses idées, et que certaines de ses assertions les plus provocantes n'étaient que des postures, qui n'enlèvent rien à sa sincérité et à sa bonne volonté, quoi que son œuvre, à mes yeux, n'atteigne à aucune grandeur.
En effet, les surréalistes ne sont pas responsables du triomphe de la laideur qui est le fait de notre époque, tout comme Schoenberg n'est pas responsable des atrocités commises par Boulez et consorts. Je maintiens cependant qu'ils ont franchi, selon moi, un point de non retour qui a ouvert la voie à une attitude nonchalante et surtout désinvolte vis à vis de la chose artistique. Mais je vous entends par ailleurs sur les autres points.
Bien sûr, il y a eu des imposteurs à toutes les époques (le XVIIIe m'en semble encore plus fécond que le XIXe), mais ces imposteurs la connaissaient au moins leur métier. Ce n'est plus forcément le cas après les surréalistes, qui ont laissé dans l'inconscient collectif l'idée que la maîtrise technique n'est pas une condition impérative à la réalisation d’œuvres d'art (bien qu'eux-mêmes étaient pour la plupart d'excellents techniciens).
Vous avez raison. J'ai utilisé beaucoup de ses œuvres car elle permettaient une illustration aisée et parlante de mon propos, mais c'était une facilité et un raccourci approximatif de ma part.
Je suis par contre en complet désaccord avec vous sur le dernier point. Du moins, je crois que le vrai, bien qu'il soit périlleux d'appliquer ce concept à une démarche artistique, est toujours la finalité ultime d'une œuvre. Bien entendu, il ne s'agit pas d'un vrai littéral ou scientifique, encore moins réaliste. J'ai regretté de n'avoir pas cité Boris Vian comme un héritier heureux des préceptes surréalistes. "Cette histoire est vraie puisque je l'ai imaginée d'un bout à l'autre" écrivait-il... C'est dans ce sens que je conçois la vérité en art.
Il est toutefois difficile pour moi de résumer ma pensée sur des sujets aussi complexes en quelques mots... Et je suis à peu près certain que si l'occasion nous était offerte de discuter de vive voix, nous tomberions d’accord sur certains des points qui nous opposent en apparence.
Encore une fois : merci d'avoir pris le temps d'exprimer si finement votre pensée, comptez sur moi pour approfondir avec toute la bonne foi dont je suis capable les questions et les objections que vous soulevez.
@@Sham-Makdessi Merci pour cette réponse aussi complète qu’intéressante !
J’ai peut-être un peu radicalisé mon premier point sur le XIXe siècle ; il n’empêche que plusieurs grands artistes et penseurs ont explicitement formulé un éloge du faux et/ou une critique du bien : Baudelaire avec les Fleurs du mal, Lautréamont avec les Chants de Maldoror, Nietzsche dans à peu près toutes ses œuvres et Mallarmé qui, dans ses correspondances avec Cazalis, définit l’art comme le “mensonge suprême” (expression laudative de sa part).
Pour le reste, je suis globalement d’accord avec vous, sauf sur la finalité de l’art. Mais là, on touche une notion très subjective donc je n’essaierai pas de vous convaincre. La citation de Boris Vian est brillante en tout cas, cette conception du vrai se rapproche en effet davantage de mes préoccupations esthétiques.
Bravo encore pour votre vidéo, je reste à l’affût de vos prochaines sorties !
@@elsewheremusic1815 Vous avez formellement raison. Ça me fait penser aussi à Sacha Guitry qui disait que jouer la comédie, c'est mentir. Je reste toutefois persuadé que les artistes que vous citez (à l'exception de Nietzsche) luttaient davantage contre le "bien - ou le vrai - académique" que contre l'idée platonicienne de ces concepts... Mais comme je vous le disais, je vais de ce pas me replonger dans la question pour affiner ma réflexion à la lumière de vos remarques. Merci encore pour ces échanges captivants !
Justesse de point de vue et de ton, magnifique!
Merci beaucoup pour vote retour ! Je suis très heureux que ce travail ait pu retenir votre attention :)
Le monde est comme l'Espagne actuelle + la guerre moyen + orient Russie ,Ukraine etc,etc
La situation est périlleuse...
16:19 : il existe des personnes qui n'ont pas de dialogue intérieur, elles ne peuvent pas entendre de voix et donc de mots. La réalité est traduite différemment pour elles, la réflexion construite autrement, donc il est possible de s'affranchir des mots pour raisonner.
Merci pour votre retour et votre réflexion :) C'est une question cruciale, et le point de vue que je défends (la pensée comme conséquence de la parole) n'est certes pas unanimement partagé. Je crois néanmoins qu'on ne peut pas raisonner sans les mots, car la raison, pour se déployer, nécessite un référentiel qui puisse être partagé, et ce référentiel est justement la parole.
Pour le dire autrement, et essayer de mieux me faire comprendre, je crois que la pensée nait du dialogue. je crois qu'il faut être au moins deux pour que la pensée, par le biais de la parole, puisse éclore. Bien sûr, il ne faut pas confondre le concept de conscience, qui peut se passer de la parole, et celui de pensée ou plus précisément de raisonnement, qui lui, en tous cas de mon point de vue, reste enchâssé dans le processus de la parole.
De la même manière, et dans l'espoir que ce parallèle puisse vous éclairer sur ma vision des choses, j'imagine qu'il est possible d'avoir conscience de quantité ou de rapports sans utiliser les chiffres ou le concept de numérotation, mais seul la connaissance de l’arithmétique permettra un "raisonnement" mathématique poussé.
Au plaisir de vous lire, et merci encore pour l'intérêt que vous avez porté à mon travail :)
@@Sham-Makdessi je vous en prie, la vidéo était très bien, je voulais juste apporter une nuance/ouverture parce que cela m'a frappé en entendant votre raisonnement mais ce n'est pas une opposition à votre point de vue. Les mots et les lettres ne sont jamais que des symboles. Je pense qu'il est possible de raisonner en formes, en couleurs, en mouvement autrement que par les mots, c'était là ma nuance aussi. Par exemple il existe des personnes sourdes et aveugles qui utilisent une langue en collant leurs mains à celles de leur interlocuteur qui ensuite réalise des mouvements de main que la personne traduit grâce au toucher et au mouvement. Comment est utilisée la représentation mentale de ces personnes en tant que conscience, pensée et traduction de leur pensée ?
En fait tout dépend de comment on interprète le mot "raisonnement", s'il se limite à la construction de la pensée, ou à une forme de logique en dehors de la pensée, beaucoup plus accrochée aux perceptions internes.
En tout cas j'ai trouvé la pluralité des approches très intéressantes dans cette vidéo, c'est rare d'avoir une telle transversalité dans des domaines qui pourtant se complètent.
Le surréalisme a beaucoup été récupéré par la publicité. Ce n'était pas le but mais c'est arrivé. Dans l'art surtout actuellement il existe beaucoup dimposteurs .
Très juste, je n'y avais pas pensé. Et oui, c'est clair, on est envahi par les imposteurs, aussi bien en musique, en peinture qu'en littérature... Il est plus que temps d'arrêter de subir cette situation, quoi que je n'ai malheureusement pas de solution miracle. Mais on peut au moins commencer par le dire et par le démontrer de manière argumentée :)
Le fait que Marcel Duchamp n' a pas une place dans ce documentaire me fait dire que les auteurs n' ont rien compris à l' histoire de l' art du 20ime siècle...!!
Merci pour votre retour. L'auteur, il n'y en a qu'un, attend avec impatience de lire le développement de votre pensée sur cette question, dans l'espoir de guérir, grâce à vos éclaircissements, cette incompréhension totale de l'histoire de l'art dont vous l'accusez de pâtir.
"Un soir, j'ai assis la Beauté sur mes genoux._ Et je l'ai trouvée amère..." A. RIMBAUD (Une saison en enfer)
... et je l'ai injuriée !
Ce sont, je crois, les premiers vers que j'ai appris par cœur :)