Premières pages de Mort à Crédit De Céline par Fabrice Luchini
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- Опубликовано: 13 окт 2024
- Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd,
si triste... Bientôt je serai vieux. Et ce sera enfin fini. Il est
venu tant de monde dans ma chambre. Ils ont dit des
choses. Ils ne m'ont pas dit grand-chose. Ils sont partis. Ils
sont devenus vieux, misérables et lents chacun dans un
coin du monde.
Hier à huit heures Mme Bérenge, la concierge, est
morte. Une grande tempête s'élève de la nuit. Tout en
haut, où nous sommes, la maison tremble. C'était une
douce et gentille fidèle amie. Demain on l'enterre rue des
Saules. Elle était vraiment vieille, tout au bout de la
vieillesse. Je lui ai dit dès le premier jour quand elle a
toussé : « Ne vous allongez pas surtout !... Restez assise
dans votre lit ! » Je me méfiais. Et puis voilà... Et puis tant
pis.
Je n'ai pas toujours pratiqué la médecine, cette merde.
Je vais leur écrire qu'elle est morte Mme Bérenge à ceux
qui m'ont connu, qui l'ont connue. Où sont-ils ?
Je voudrais que la tempête fasse encore bien plus de
boucan, que les toits s'écroulent, que le printemps ne
revienne plus, que notre maison disparaisse.
Elle savait Mme Bérenge que tous les chagrins viennent
dans les lettres. Je ne sais plus à qui écrire... Tous ces gens
sont loin... Ils ont changé d'âme pour mieux trahir, mieux
oublier, parler toujours d'autre chose...
Vieille Mme Bérenge, son chien qui louche on le
prendra, on l'emmènera...
Tout le chagrin des lettres, depuis vingt ans bientôt,
s'est arrêté chez elle. Il est là dans l'odeur de la mort
récente, l'incroyable aigre goût... Il vient d'éclore... Il est
là... Il rôde... Il nous connaît, nous le connaissons à
présent. Il ne s'en ira plus jamais. Il faut éteindre le feu
dans la loge. À qui vais-je écrire ? Je n'ai plus personne.
Plus un être pour recueillir doucement l'esprit gentil des
morts... pour parler après ça plus doucement aux choses...
Courage pour soi tout seul !
Sur la fin ma vieille bignolle, elle ne pouvait plus rien
dire. Elle étouffait, elle me retenait par la main... Lefacteur est entré. Il l'a vue mourir. Un petit hoquet. C'est
tout. Bien des gens sont venus chez elle autrefois pour me
demander. Ils sont repartis loin, très loin dans l'oubli, se
chercher une âme. Le facteur a ôté son képi. Je pourrais
moi dire toute ma haine. Je sais. Je le ferai plus tard s'ils
ne reviennent pas. J'aime mieux raconter des histoires.
J'en raconterai de telles qu'ils reviendront, exprès, pour
me tuer, des quatre coins du monde. Alors ce sera fini et
je serai bien content.
Sublime
"Ils ont changé d'âme pour mieux trahir"... En effet Fabrice, prophétique.
Superbe.
Il passe beaucoup trop vite sur le "et puis voilà, et puis tant pis" qui a toujours la même sonorité et force pour moi que "ça a débuté comme ça".
tout a fit d'accord:)
Arletty et sa gouaille parisienne a été, bien avant F. Luchini, une remarquable lectrice de LF Céline : la belle et le génie. 👍❤
Sans oublier les lectures faites par le grand Michel Simon...
Vive Celine
0:24 debut
Copé 2027
Qu' est-ce qu' il fatigue ce type avec ses vieux trucs toujours les mêmes et sa supercherie à faire courir les gogos !
Céline une supercherie à faire courir les gogos? Ha ha ha ! Vous préférez sans doute Guillaume Musso?
C'est pas terrible, littérairement, non ?... On dirait un peu du Prévert en prose, vous savez, le populisme plaintif à petit calibre, légèrement musical, légèrement boulevardier. Céline n'est considéré comme "grantécrivain" qu'en France, faut-il le rappeler ; partout ailleurs sur Terre, il indiffère, et il doit y avoir une raison à cela. Henri Béraud transformé en métaphysicien par la critique ; un Frédéric Dard (moins drôle, quand même) vu comme du Bergman ; un chansonnier populaire considéré comme un Mozart de la prose ; un arc à une seule corde (pathétique plaintif épico-comique) qui passe pour un orchestre varié ; l'Hôtel du Nord de Dabit dont veut nous faire croire que s'y trouvent les profondeurs de gouffres sacrés... Sacré tour de passe-passe que la carrière littéraire de cet invraisemblable ordure et irresponsable personnage, avec ça, et surtout écrivain suprêmement surfait. Mais la mode Céline, triomphante aujourd'hui auprès des incultes, aura une fin !...
Je suis belge et j'ai beaucoup de concitoyens qui pensent le plus grand bien de l'oeuvre de Céline. En dehors de la francophonie je peux concéder qu'il manque de popularité mais n'est ce pas ce qu'il y a de plus normal puisque son oeuvre réside avant tout sur un style presque intraduisible? Son passé sulfureux, comme vous l'évoquez, ne permet en général aux lecteurs que de le découvrir tardivement au vue de l'omerta pratiquée dans l'enseignement. Enfin les auteurs français les plus connus à l'étranger sont également ceux dont les oeuvres ont été adaptées aux différents médias.
C'est entièrement faux. Céline a éte traduit dans le monde entier et a inspiré entre autres de nombreux écrivains améircains. Vous dites n'importe quoi.
J’en ai lu des conneries mais là c’est du grand art ! Une page de Celine vaut mieux que l’œuvre entière de 99 % des écrivaillons actuels.
Dites moi mon cher Jean, que lisez vous? Je pense qu’une fois vos couilles retrouvées pour nous citer quelques precieuses references, nous seront fixés sur votre cuistrerie.
Jim Morrison citait Céline….Lui et bien d autres …